Peinture canadienne des années 30

Le Groupe de l'Est et la Société d'art contemporain

Dans les années trente, une nouvelle voix a commencé à se faire entendre dans le milieu artistique canadien. Cette voix appartenait à John Lyman, qui, en moins de dix ans, allait contribuer à transformer l’art au Canada.

De 1936 à 1940, Lyman a rédigé un éditorial mensuel pour The Montrealer, dans lequel il commentait l’actualité de l’art canadien et établissait des liens entre celui-ci et les tendances internationales de l’heure. Insistant sur l’importance de l’art contemporain français, Lyman et le critique Maurice Gagnon sont parvenus à éveiller un intérêt pour les développements internationaux en peinture, qui allaient déterminer les tendances futures à Montréal.

Lyman reconnaissait qu’il y avait à Montréal des nouveaux artistes qui ne recevaient aucun soutien de la part des institutions publiques et avaient rarement l’occasion d’exposer leurs œuvres. Lyman a réuni ces artistes et a créé le Groupe de l’Est au printemps 1938.

Le nouveau groupe comptait parmi ses membres John Lyman, Alexandre Bercovitch, Eric Goldberg, Goodridge Roberts, Jack Humphrey et Jori Smith. Comme Lyman l’a affirmé lui-même, ce qui caractérisait les artistes du Groupe de l’Est était leur ouverture aux influences européennes. Philip Surrey a remplacé Jack Humphrey comme sixième membre du groupe l’année suivante.

Il est rapidement devenu évident qu’il fallait mettre sur pied une association plus importante afin de rassembler des artistes d’horizons différents et faire avancer la cause de l’art moderne. En janvier 1939, la Société d’art contemporain voyait le jour. La Société, qui était bien plus qu’une association d’artistes, cherchait à favoriser le développement d’un art vivant et progressif sensible à la vie moderne. Selon Lyman, « La Société jouait le rôle « d’anti-académie », en mettant l’accent sur le dynamisme de l’art, ainsi que sur l’imagination, la sensibilité, l’intuition et la spontanéité, par opposition aux compétences classiques ».

Afin de remplir son rôle éducatif, la Société d’art contemporain a organisé une première exposition intitulée Art of Our Day qui mettait en vedette des œuvres non canadiennes empruntées à des collectionneurs montréalais. Elle signalait le début d’un effort concerté pour la promotion de l’art contemporain.

Outre Robert Ayre, la plupart des critiques qui couvraient l’évolution de la Société d’art contemporain étaient des Canadiens français qui se mirent rapidement à évoquer le manque d’artistes canadiens français au sein du groupe. Seuls quatre des membres étaient francophones : Paul-Émile Borduas, Stanley Cosgrove, Louise Gadbois et Jean Palardy. Des développements politiques, artistiques et littéraires sont toutefois venus transformer la Société en une des principales forces de la vie culturelle canadienne française.

Trouver l’universel au moyen d’une expression subjective, établir un lien entre la vie intellectuelle québécoise et la source des idées du vingtième siècle en France, dans une alliance des esprits et non dans une servitude coloniale, voilà quelle était l’orientation des années quarante. Avec l’arrivée de France du Père Marie-Alain Couturier en mars 1940, et Alfred Pellan en mai, la scène était prête.