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Sans titre
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Jean-Paul Riopelle
Sans titre, 1953
encre en couleurs sur papier vélin
74,5 x 107,4
Acheté en 1998
© Jean-Paul Riopelle, SODRAC (Montréal) 1999

La carrière de Jean-Paul Riopelle débute à Montréal, où il étudie auprès de Paul-Émile Borduas et se retrouve bientôt parmi les membres fondateurs des Automatistes. Après la reconnaissance initiale du nouveau groupe, à l’exposition de la Société d’art contemporain de 1946, Riopelle part pour Paris. Il ne reviendra que brièvement à Montréal en 1948 pour signer le manifeste du Refus global, choisissant plutôt de vivre ces premières années à Paris. Il y deviendra l’un des peintres canadiens les plus célèbres à l’échelle internationale.

En 1953, Riopelle est l’une des étoiles montantes du mouvement de l’abstraction lyrique alors en pleine évolution. Des marchands parisiens d’avant-garde le représentent et ses œuvres lui valent l’admiration d’un critique d’art influent, Georges Duthuit, beau-frère de Pierre Matisse, l’un des marchands d’art les plus en vue de New York. Matisse propose à Riopelle de devenir son agent américain en 1953. Dès janvier suivant, Sans titre fera partie de la première exposition Riopelle à la Pierre Matisse Gallery, en compagnie d’autres dessins à l’encre de couleur et de dix-huit toiles, dont Knight Watch et Tocsin (aussi au MBAC). D’une qualité vraisemblablement exceptionnelle, cette exposition a certainement contribué à placer Riopelle au rang des expressionnistes canadiens abstraits les plus importants.

Le travail à l’encre de couleur reste sans doute l’aspect le moins connu de l’œuvre de Riopelle, un sort qu’il ne mérite pas, surtout si l’on pense à des œuvres aussi accomplies et somptueuses que Sans titre. Appartenant à une série de dessins à l’encre de couleur inspirés par l’admiration de l’artiste pour Claude Monet, et notamment pour ses nymphéas, Sans titre traduit indéniablement une certaine émulation. Grâce à la pulvérisation des couleurs, Riopelle parvient ici à saisir les qualités de transparence et de profondeur infinie de l’eau, ainsi que son miroitement. L’encre de chine appliquée en barbouillages et en dégoulinades par-dessus les couleurs permet de reproduire l’effet des nénuphars flottant à la surface de l’eau, leurs tiges pénétrant dans la couleur liquide de l’étang.

Sans titre est une œuvre charnière dans l’art de Riopelle. L’encre noire évoque le tachisme à la manière de Pollock des années 1950–1952, où l’on aspergeait la peinture sur la toile en la laissant dégouliner. Par ailleurs, les taches d’encre noire suggèrent le style mosaïque de 1952–1953, créé par l’application de la peinture à la spatule. Ces œuvres du début des années 1950 ont en commun une épaisseur dense des pigments et cette application uniforme de la couleur sur toute la surface ne laisse aucune place à l’air et à la lumière. Avec leur décomposition des motifs en mosaïque et la réduction de la densité des pigments, les dessins à l’encre de couleur de 1953 inspirés de Monet tendent vers une nouvelle direction. L’air et la lumière pénètrent librement dans l’œuvre, un effet que l’on remarquera notamment dans son chef-d’œuvre Pavane de 1954, également conservé au MBAC.