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Nu allongé
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Jacopo Pontormo

Nu allongé, v. 1530-1540
Pierre noire sur papier ivoire
Acheté en 2004

Cette oeuvre figurant au catalogue de la célèbre exposition d'une centaine de dessins de Michel-Ange, tirés de la collection de Thomas Lawrence, fut attribuée pendant au moins deux cents ans à la main du maître en tant qu'étude pour l'Adam endormi dans sa fresque de la chapelle Sixtine, La création d'Ève. En réalité, ce dessin double-face est l'oeuvre d'un artiste toscan, plus jeune que Michel-Ange mais profondément influencé par lui, Jacopo Pontormo, l'une des figures dominantes du maniérisme italien. Le dessin représente un homme nu, endormi, dont le visage appuyé sur son bras gauche repose sur un grand objet cylindrique et dont le bras droit est tiré derrière. C'est une oeuvre de maturité qui, par la facture délicate et spontanée à la pierrenoire et par le traitement du corps humain - la silhouette est allongée, presque segmentée -, évoque les derniers dessins de Pontormo pour le projet du choeur de l'église de San Lorenzo, laissé inachevé à sa mort, et qui figurent parmi les esquisses les plus extraordinaires jamais produites par un artiste italien. L'équilibre général de la composition, sa précision sculpturale et l'émotion retenue qu'elle dégage la rapprochent des études de personnages, pour la plupart conservées aux Offices à Florence, qu'il a conçues dans les années 1530 pour des fresques destinées aux villas des Médicis à Poggio a Caiano, Careggi et Castello. Ce personnage délicat et plutôt mélancolique, un prisonnier de guerre peut-être, pourrait lui aussi avoir été réalisé pour l'une de ces fresques profanes.

C'est dans les années 1530 que le style de Pontormo se rapproche le plus de celui de Michel-Ange, ce qui rend plus compréhensible l'ancienne attribution du dessin. Par deux fois au cours de cette période, Pontormo exécute des peintures monumentales achevées d'après des dessins de Michel-Ange. On peut retrouver, dans l'art de ce dernier, des prototypes de la pose du personnage à la musculature exagérée, de même que le travail précis, mais presque aérien, de la pierre noire. Comme son maître, Pontormo était un grand cartographe du corps masculin, et cette feuille récemment découverte est l'un des rares exemples à faire ressortir le rapport entre les deux artistes. Pontormo ne craignait pas de déjouer les canons anatomiques pour obtenir un effet décoratif et, à cette étape-ci de la création de ce nu, l'artiste ne travaillait plus directement d'après le modèle vivant. Toutefois, même si le traitement du sujet dépasse délibérément ce que la nature peut produire, des détails comme le pied gauche placé sous le genou témoignent d'une observation directe de la vie.