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Ferus
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Robert Murray
Ferus, 1963
Acier peint
360,8 x 111 x 56 cm
Acheté en 1999
Photo : Robert Murray

Originaire de Vancouver, le sculpteur Robert Murray grandit à Saskatoon qu'il quitte définitivement en septembre 1960 pour s'installer à New York. Sa carrière prend véritablement son essor au cours des années 1960 et 1970 grâce aux nombreuses commandes de sculptures monumentales qu'il reçoit tant du Canada que des États-Unis. En effet, la sculpture devient alors un mode d'expression majeur de la création contemporaine et la sculpture monumentale abstraite atteint son apogée durant ces deux décennies, son rayonnement étant favorisé par l'augmentation des moyens techniques dont dispose cette discipline. Pour la génération de sculpteurs émergeant à ce moment, le travail en usine devient plus systématique, et les méthodes de l'industrie, à la fois une source d'inspiration et une fin en soi.

À l'été 1963, Murray réalise une première version de cette œuvre en bois et en fer, alors qu'il se trouve à Lookout Island dans la baie Georgienne en Ontario, un endroit magnifique où il passera dorénavant ses étés. Il lui donne le titre de Pointe-au-Baril I. Plus tard, à la suggestion du peintre américain Barnett Newman avec lequel il s'est lié d'amitié, Murray remplace Pointe-au-Baril I par Ferus, une seconde version en acier qui résistera mieux aux intempéries; il l'a façonnée à l'usine de fabrication Treitel-Gratz, New York, et l'a peinte en rouge. Installée sur un roc face à l'entrée d'un chapelet d'îles, Ferus deviendra avec le temps un point de repère notoire pour la navigation dans cette région. Œuvre asymétrique, elle encadre le paysage et nous force d'une certaine façon à regarder la nature à travers un objet de culture. L'espace changeant qui se déroule au ralenti à l'intérieur de la sorte de « cadre » qu'est Ferus altère à la longue la perception que nous en avons. Cette sculpture constitue pour Murray une œuvre fondamentale, une source très féconde à laquelle il reviendra tout au long de sa carrière, notamment dans ses travaux à deux dimensions comme les dix Bannières de Trent (1986), commandées pour le grand hall du Collège Champlain de l'Université Trent de Peterborough, ou encore la Série de Trent (1991), une suite de dix estampes conservées dans la collection du MBAC.

La dualité des formes comme principe d'organisation en sculpture, un procédé auquel Murray recourt fréquemment, provoque souvent un déséquilibre dynamique que l'artiste exploite avec brio. La monochromie joue alors un rôle unificateur en réduisant les tensions créées par cette dualité sans atténuer le dialogue entre les parties. À l'instar des peintres de la même époque, Murray s'efforce donc de contrer les facteurs de division et les effets de morcellement du cubisme - il en restait des résidus tenaces dans les divers modes d'expression artistique - par une recherche de moyens d'unification. Il possède en outre ce sens inné de la couleur qu'il réussit à la fin à rendre inséparable de la forme inventée. Ferus est sa première sculpture monumentale de couleur au vocabulaire réducteur. Si l'on considère l'ensemble du contexte canadien du début des années 1960, Ferus démontre par sa simplicité voulue une nouvelle sensibilité qui prendra vers 1965 le nom de « minimaliste ». En 1965 justement, Ferus fit partie de la première exposition de l'artiste à New York chez Betty Parsons, une galerie d'art très en vue dans le milieu; on avait déjà pu la voir à la Washington Square Gallery de New York en 1964 et par la suite l'Institute of Contemporary Art de Boston allait l'accueillir en 1967.