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Prométhée II
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Leon Golub
Prométhée II, 1998
Acrylique sur toile de lin
302,3 x 246,4 cm
Acheté en 2000
Leon Golub, Prométhée II, 1998 © VAGA (New York)/SODART (Montréal) 2003

La carrière de Leon Golub couvre plus d'un demi-siècle. Après des études d'histoire de l'art à l'Université de Chicago et une maîtrise en beaux-arts à l'Art Institute of Chicago, Leon Golub vit quelque temps en Italie et à Paris, puis repart pour les États-Unis en 1964. Ses toutes premières œuvres révèlent l'influence des objets façonnés associés aux cultures d'Afrique, d'Océanie et de la côte nord-ouest américaine exposés au Field Museum of Natural History de Chicago, ainsi que celle des sculptures étrusques et de la fin de l'époque romaine vues durant son séjour en Italie. Jusqu'à la fin des années 1960, Golub se consacre au nu masculin, empruntant à la fois aux vocabulaires du primitivisme et de la fin de la période classique; il présente tout d'abord ces figures individuellement, puis par paires ou par groupes antagonistes. Le rendu, résolument expressionniste, intègre distorsion, fragmentation et surfaces extrêmement texturées. S'il voit son travail devenir à la mode dans les années 1980, lorsque le monde de l'art se tourne vers le néo-expressionnisme, Golub se distingue toutefois de ses contemporains plus jeunes par sa vision largement humaniste et par son insistance à revenir aux « grandes » questions sur la nature humaine et sur le sens de la responsabilité morale.

À son retour aux États-Unis, sa démarche évolue vers un contenu plus objectif, proche du reportage, et vers un rendu pictural plus simple et plus plat. Profondément marqué par la guerre du Vietnam, il s'inspire d'autres sources, dont des photos de journaux et de revues, et pour la première fois surgissent alors dans ses œuvres des hommes, et parfois des femmes, vêtus de façon moderne et placés dans des situations contemporaines, ainsi que des allusions transparentes à des événements d'actualité. Les œuvres qui établissent sa réputation dans les années 1970 et 1980 sont consacrées aux mercenaires et aux forces paramilitaires chargées de la sale besogne de la guerre et de l'oppression en Amérique centrale, en Afrique du Sud et ailleurs. La violence de ces images est profondément inquiétante, d'autant plus que ces compositions frontales, plus grandes que nature, amènent le spectateur à se sentir directement concerné par la situation représentée.

Le thème des œuvres récentes, telle Prométhée II, se révèle à la fois plus personnel et plus symbolique. Titan condamné par Zeus à avoir le foie sans cesse déchiré par un aigle pour avoir volé le feu, Prométhée prend ici les traits d'un voyou minable qui se lamente sur son sort dans un langage très moderne. Un panneau portant la mention « Public Notice : Raptor sanction » [Avis public : la sanction du rapace] et un journal de grand format, collé au mur lui faisant face et annonçant « Guilty titan condemned » [Titan coupable condamné] renvoient aux mondes familiers du sensationnalisme des médias et de la rectitude morale. Lorsqu'il arriva pour la première fois à New York, Golub cherchait des sujets ayant une dimension épique pour mieux réagir à la distanciation froide qui caractérisait alors le monde artistique. En 1968, il fit remarquer à Irving Sandler qu'il était particulièrement impressionné par l'ampleur de la murale d'Orozco au Pomona College, Le triomphe de Prométhée. Prométhée transcende le modèle de l'antihéros. Chargé par Zeus de façonner les hommes avec de la terre glaise et de l'eau, il dérobe le feu du ciel par compassion pour leurs souffrances. Son pouvoir créateur fait de lui le rival de Zeus, une sorte d'agent provocateur qui devient l'emblème de l'artiste lui-même. Le pathétique de cette représentation de Prométhée pourrait être l'expression ironique de l'apitoiement sur soi d'un artiste qui souffre de voir diminuer ses propres pouvoirs.