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Manifestation
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Michael Snow
Manifestation, 1999
Photographie couleur imprimée par jet d'encre et plastifiée, peinture aérosol, papier noir, miroir
206,6 x 114,4 cm
Acheté en 2001
© Michael Snow

Michael Snow montre un intérêt soutenu pour la photographie depuis les années 1960. Ses œuvres ont souvent un caractère philosophique dans la mesure où elles abordent le processus de la création de l'image et la façon dont l'appareil cadre et ordonne la réalité. Snow fait de cette forme d'art le sujet même de son œuvre, examinant comment l'image peut tout à la fois et en même temps être réelle et illusoire, objet et représentation de l'objet. Notamment, on le voit constamment fasciné par cette capacité que possède la photographie d'interpréter en deux dimensions un espace tridimensionnel. L'appareil « aplanit » la réalité, phénomène souvent négligé puisque nous avons tendance à ne regarder une photo que pour voir le sujet qu'elle représente. Une œuvre de 1988, In Medias Res, nous montre un perroquet s'échappant de sa cage. Photographiés en plongée, les meubles, les personnages et le perroquet semblent tous compressés sur fond de tapis oriental. Les dimensions de l'image correspondent à celles du vrai tapis, et l'artiste a choisi d'exposer l'œuvre à même le sol, comme un tapis. La photographie fonctionne ici comme un objet, voire une sculpture, qui existe en temps réel et dans un espace réel. L'image décrit une scène réelle tout en étant une représentation abstraite. Dans cette œuvre ainsi que dans d'autres œuvres apparentées, Snow souligne la nécessité d'interpréter les photographies. Le spectateur doit faire appel à son imagination pour reconstruire les éléments temporels et spatiaux des scènes représentées afin de comprendre ce qui se passe.

La faculté que possède l'appareil photographique à la fois de déformer et d'enregistrer fidèlement des aspects de la réalité se révèle un élément essentiel de Manifestation (autourisation de huit faces). Michael Snow décrit cette œuvre de 1999 comme une nouvelle version d'Autorisation (1969), dans la collection du Musée des beaux-arts. Les miroirs, à la fois supports matériels et parties intégrantes du sens des œuvres, occupent dans les deux cas une place prédominante. Pour Autorisation, Snow s'est lui-même pris en photo devant un miroir, puis il a placé le cliché résultant de l'opération sur un miroir pour pouvoir multiplier par quatre le processus de reproduction. En conséquence, l'acte photographique est lui-même saisi dans le miroir et dans les photographies, celles-ci gardant la preuve de leur propre fabrication.

L'artiste apparaît à nouveau dans Manifestation (autourisation de huit faces), mais il prend cette fois l'apparence d'une figure trouble et multiple. À l'instar d'Autorisation, l'image représente l'acte de la création photographique. La trace du mouvement du sujet dans la prise de vue unique transmet la fuite du temps. Snow relie le mouvement, ou effet de flou de l'image, à la peinture - « geste pictural au cœur du procédé photographique ». Le temps présent contraste avec le temps cosmique ou céleste auquel renvoie la photographie des galaxies apparaissant derrière l'artiste. Les éclaboussures de peinture au premier plan font écho aux points des étoiles. Cette représentation virtuelle de la peinture s'oppose à son tour à la tache de vraie peinture rouge vaporisée sur la pellicule transparente qui protège la photo. Quant au spectateur, il est lui aussi présent, réfléchi dans la partie inférieure du miroir. En effet, il « complète » la pièce, plaçant l'œuvre dans le temps et l'espace réels du musée d'art.

Comme bien des œuvres de Michael Snow, les nombreux tours et détours de Manifestation (autourisation de huit faces) forment un casse-tête qui invite à la méditation. Plus important encore peut-être, Manifestation nous livre un autoportrait de Snow grandeur nature, riche et séduisant, qui incarne la réflexion incessante de l'artiste sur la nature de la photographie.