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Ron Mueck a travaillé dans les domaines de la publicité, de la télévision pour enfants et du cinéma avant de se tourner vers les beaux-arts et la sculpture figurative. Installé à Londres en 1983, il devient concepteur de maquettes professionnel pour les Muppets de Jim Henson. Mais son travail comme artiste retient l'attention du public pour la première fois grâce à Dead Dad (1996-1997), une réplique hyperréaliste de son père décédé, présentée dans l'exposition Sensation: Young British Artists from the Saatchi Collection (1997) à la Royal Academy of Arts. Le corps nu du père est posé à même le sol, couché sur le dos; la figure est tellement précise qu'on pourrait la qualifier de trompe-l'il. Cependant, là où la plupart des sculpteurs hyperréalistes, tels Duane Hanson ou John D'Andrea, travaillent en grandeur nature, Dead Dad mesure un mètre de long. Plus récemment, Mueck a exposé Boy (2000), une sculpture fortement surdimensionnée, au Millennium Dome de Londres ainsi qu'à la dernière édition de la Biennale de Venise. Avec Sans titre (Vieille femme au lit), Mueck poursuit dans la même veine. Une femme âgée enveloppée dans des couvertures est couchée sur le côté en position ftale, une main courbée sous le menton et l'autre logée dans les replis de son corps. Sa tête, qui sort des couvertures, est délicatement supportée par un oreiller. Le rendu de la tête est hyperréaliste : des cheveux gris tombent sur le front de la femme qui a la bouche et les yeux ouverts. Contrairement à Dead Dad, le sujet est vivant, comme on le voit à sa narine luisante, mais à l'instar de Dead Dad, son corps a la taille de celui d'un enfant. Par leurs proportions réduites, les deux sculptures objectivent le moment où le parent devient l'enfant et où l'enfant doit en retour assumer le rôle de parent. Le choix de l'échelle souligne également le manque de fiabilité de la mémoire en ce qui a trait aux dimensions des choses. Le travail de Mueck s'inscrit dans un fort courant de l'art britannique récent qui manifeste une préoccupation pour les enjeux touchant la vie et la mort. Peut-être Sans titre (Vieille femme au lit) propose-t-il un portrait de la fin de l'existence, ou bien une réinterprétation du genre de la nature morte. Le vieillissement du corps - le nôtre ou celui des autres - provoque des sentiments complexes sinon conflictuels : la colère peut s'y mêler à la compassion et à la conscience de l'imminence de la mort. Avec sa Vieille femme au lit, Mueck aménage un espace qui invite le spectateur à méditer sur cette étape inévitable de la vie et à en discuter publiquement. |